L’impression 3D d’organes humains bientôt possible ?
– Le Monde 2014 –
Et si demain nous pouvions imprimer en 3D nos organes sur commande ? Pitch d’un film de science-fiction ou projet fou de scientifiques devenant réalité ? Incroyable mais vrai, l’homme de demain pourra vivre avec des organes fabriqués de toutes pièces grâce à des imprimantes 3D comme le démontre cet article. Alors que l’impression 3D biologique avance à grand pas, sera-t-il bientôt possible d’imprimer un corps humain en 3D ? Rhiannon Williams mène l’enquête.
Le “bioprint“ est le procédé de créer des tissus humains par le biais d’imprimantes 3d. D’un point de vue technologique, l’ascension et le développement de l’impression 3d et ses capacités joueront un rôle indéniable dans notre futur. Mais comment ça fonctionne ?
La société PrinterInks basée en Grande-Bretagne a fait équipe avec la startup américaine Organovo, une société spécialisée dans la conception et l’impression de tissus humains fonctionnels pour la recherche médicale et les applications thérapeutiques.
Les tissus humains imprimés en 3d sont créés à l’aide de cartouches d’imprimante composées de cellules provenant de biopsies de patients ou de cellules souches. Les cellules prélevées sont cultivées dans un milieu de croissance selon des techniques standard, ce qui leur permet de se multiplier.
Une fois que suffisamment de cellules ont grandi, elles sont recueillies et chargées dans une cartouche pour créer le “BioInk“ ou encre biologique.
Ensuite, l’encre biologique est chargée dans une imprimante Novogen MMX avec une cartouche d’hydrogel, une sorte de mélange d’eau, utilisée comme une sorte d’échafaudage pour la construction de couches de cellules 3D. La machine 3D imprime une couche de gel à base d’eau, suivie d’une couche de cellules d’encre biologique, et ainsi de suite. Les deux couches fusionnent naturellement entre elles et ainsi de suite.
Une fois que la quantité de couches souhaitée est imprimée, on laisse le tissu imprimé reposer et se développer. Puis on enlève l’hydrogel. D’autres chercheurs ont expérimenté le bioprint avec succès en utilisant un sucre et une solution d’eau comme échafaudage pour les structures.
Les tissus imprimés actuellement sont généralement utilisés dans la recherche médicale. Pour les tester, on introduit des maladies afin de surveiller la façon dont le tissu réagit pour développer des traitements futurs. Dans l’avenir, il est très probable que les imprimantes 3D seront utilisées pour créer des tissus pour les implanter dans les organes actuels. L’impression d’organes entiers, si elle est approuvée, pourrait être une réalité dans la prochaine décennie.
Organovo a récemment “bioprinté“ ou bio-imprimé, à des fins de test, son premier tissu du foie en 3D. En 2010, la société a également imprimé le premier vaisseau de sang humain sans l’utilisation d’“échafaudages“.
Les chercheurs estiment qu’actuellement il faudrait 10 jours pour imprimer un foie et un lobe d’oreille de taille moyenne, mais ils estiment que la rapidité et l’efficacité avec laquelle ils pourraient créer de telles structures tissulaires vont grandement progresser à l’avenir. Après tout, il faudrait 1.690.912.929.600 heures pour imprimer un foie pour chaque membre de la race humaine à l’aide du processus actuel.
Dans le même temps, Organovo prévoit de commercialiser et de lancer son tissu de foie 3D pour les sociétés pharmaceutiques et les laboratoires de recherche d’ici le mois de décembre.
En août 2013, l’université Hangzhou Dianzi en Chine a annoncé avoir créé une nouvelle l’imprimante 3D “biomatérielle“, qui a imprimé un petit rein ces quatre derniers mois. Plus tôt en 2013, aux Etats- Unis, une enfant de deux ans a reçu une trachée construite à partir de ces propres cellules souches.
L’université de Princetown a imprimé une “oreille bionique“ en utilisant une imprimante à « jet d’encre biologique ». Sur le plan de l’éthique et de la morale, des chercheurs ont manifesté leur inquiétude en ce qui concerne la qualité des organes et le contrôle de leur production. D’autres soutiennent que l’impression 3D de composants humains brouille les lignes entre l’homme et la machine, leur procurant le droit de “jouer à Dieu“ sur une échelle sans précédent. Mais quoi que l’on en pense, on ne peut nier le fait que le “bioprint“ a le potentiel pour révolutionner la médecine et les services de soins au-delà de ce qui semblait possible il y a encore 20 ans.